ADIV – Association des développeurs immobiliers vaudois

Robert Ischer – Frédéric Dovat

 

Au combat pour résoudre la problématique du logement

L’Association des développeurs immobiliers vaudois (ADIV) assure la défense, la valorisation, la promotion et la visibilité des métiers impliqués à chaque étape du développement immobilier. Forte d’une quarantaine de membres, elle vise à catalyser les projets et favoriser un environnement propice pour les développeurs immobiliers en rassemblant tous les intervenants, afin de faire entendre une voix unifiée. Rencontre avec Robert Ischer et Frédéric Dovat, respectivement Président et Secrétaire général de l’association. Interview.

Quelles sont les missions et le fonctionnement de l’ADIV ?

Fondée en janvier 2019, l’ADIV représente les intérêts des professionnels de l’immobilier dans un contexte de crise du logement et d’exercice croissant d’oppositions, de référendums et d’initiatives populaires à l’encontre de tout projet de construction. Son comité exécutif, soutenu par des conseillers spécialisés, défend les intérêts de ses membres, notamment en matière de lobbying, et d’interventions politiques dans le cadre de tout projet législatif immobilier. L’ADIV surveille également l’aménagement du territoire dans le cadre des révisions des plans d’affectation communaux. Devenue un interlocuteur privilégié des autorités, l’ADIV peut apporter un soutien aux communes dans le cadre de leur planification territoriale. Son objectif est de défendre l’intérêt général de son secteur d’activité, sans se focaliser sur des projets spécifiques. En outre, elle propose régulièrement à ses membres des manifestations sur des thèmes d’actualité et des formations continues liées à l’immobilier.

Pouvez-vous nous rappeler les enjeux du parc immobilier vaudois?

Dans un contexte où les ambitions en matière de rénovation énergétique sont portées par le projet de révision de la loi cantonale sur l’énergie, et dans une perspective de densification urbaine, il est pertinent de dresser un constat de la situation actuelle. Actuellement, deux tiers des bâtiments dans le canton de Vaud sont encore chauffés à l’aide d’énergies fossiles, et 39 000 d’entre eux sont considérés comme énergivores (classes énergétiques F et G du CECB). Bien que les émissions de CO2 aient diminué de 34% entre 1990 et 2019, passant de 17,1 millions de tonnes à 11,2 millions de tonnes, ces efforts doivent continuer afin d’atteindre les objectifs cantonaux, qui semblent toutefois disproportionnés. En effet, pour rénover ces 39 000 bâtiments classés F et G du CECB, les autorités devront rendre chaque année 2600 décisions (7 décisions par jour, sans recours et oppositions) jusqu’en 2040, ce qui nécessite des ressources qui vont bien au-delà des capacités actuelles. De plus, il est crucial de distinguer les immeubles des villas, lesquels présentent des niveaux d’émissions de CO2 différents. L’ADIV est favorable à la transition énergétique, mais les défis financiers, techniques et temporels doivent être pris en compte, surtout face à une législation qui semble trop rigide et indifférenciée. Il est prévu que l’Etat octroie une subvention annuelle de 120 millions de francs suisses, ce qui est jugé nettement insuffisant par les professionnels de l’immobilier. Nous proposons des solutions pragmatiques, telles que la mise en place de conventions basées sur des objectifs clairs et réalistes, fixés en fonction des moyens financiers du propriétaire et des émissions de CO2 de son immeuble.

Quels sont vos chevaux de bataille ?

De nombreux défis nous mobilisent dans un contexte politique souvent enlisé et face à des recours de citoyens qui vont à l’encontre de l’intérêt collectif. Cette situation survient alors que la pénurie de logements et les loyers élevés sont des problématiques croissantes. Avec un besoin annuel de logements sur le canton compris entre 5000 et 8000, et un taux de vacance inférieur à 1,5%, il est crucial de sensibiliser la population aux conséquences du rejet de projets de densification urbaine, pourtant prévus par la loi et soutenus lors du vote de 2013 sur la révision de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire. Nous souhaitons encadrer les initiatives populaires, comme cela est déjà le cas dans le canton du Valais où les initiatives populaires ne sont plus possibles pour les plans d’aménagement du territoire validés depuis moins de 15 ans. Il est peut-être temps d’envisager un assouplissement de cette législation susmentionnée et de son application dans notre canton, afin que les minorités ne dictent pas la loi et que l’intérêt public prime. Par ailleurs, nous tenons à rappeler aux communes que le recours au droit de préemption ne va pas lutter contre la pénurie de logements, et qu’il existe d’autres options d’actions à considérer telles que le partenariat public-privé.

Pouvez-vous nous rappeler le fonctionnement du droit de préemption ?

La loi vaudoise sur la préservation et la promotion du parc locatif (LPPPL) accorde aux communes un droit de préemption pour acquérir en priorité les terrains mis en vente et destinés à la construction, sous certaines conditions. Ce droit ne concerne que la création de logements d’utilité publique (LUP), comme les logements subventionnés, protégés, pour étudiants ou à loyers abordables. Il s’applique dans les districts en pénurie de logements et sur des parcelles d’au moins 1500 mètres carrés, sauf exceptions. Cependant, cette mesure est critiquée pour son impact sur la liberté de choix de l’acheteur par le vendeur et en raison du fait que certaines communes l’utilisent afin de réaliser une opération purement financière. Rappelons que le droit de préemption des communes s’exerce aux conditions prévues par l’acte de vente et que le coût de la construction reste inchangé, que le maître d’ouvrage soit privé ou public.

Pourquoi le droit de préemption devient-il un problème sur le canton ?

Le droit de préemption, tel que défini dans la LPPPL, soulève bon nombre de préoccupations. Bien que visant à répondre aux besoins de logement de la population, il ne génère pas de nouveaux logements et implique des dépenses pour la collectivité, s’éloignant de son rôle initial. Plutôt que d’agir en tant que promoteur immobilier, la collectivité devrait se concentrer sur la création d’un cadre favorable à la diversité des logements. De plus, le recours à ce mécanisme nécessite des ressources financières importantes et peut entraîner des litiges juridiques coûteux et longs. Pour favoriser le développement de l’offre de logement, il est essentiel de simplifier les procédures et de favoriser les partenariats public-privé, qui peuvent permettre la création de logements abordables sans risque financier pour la commune, l’investisseur privé assumant ce risque.

Certaines communes abusent-elles de ce droit et dans quel but ?

Oui, clairement, c’est le cas. Certaines communes utilisent le droit de préemption, non pas pour créer davantage de LUP, mais pour réaliser des opérations purement financières. En effet, dans certains cas, la commune acquiert un bien-fonds déjà construit, via son droit de préemption, puis elle propose un droit de superficie sur ce bien acquis déjà construit à des tiers, en échange du versement d’une rente régulière. Un tel procédé semble être une manœuvre purement financière, en contradiction avec l’esprit de la loi. Dans un tel cas, la commune délègue à un tiers la responsabilité de transformer les logements en LUP et se contente d’encaisser sa rente de superficie. Nous avons fait remonter ces problématiques à quelques députés afin de mieux cadrer ces pratiques.

Quelles sont les alternatives au droit de préemption ?

Il nous semble essentiel de cadrer davantage le droit de préemption afin que son exercice reste exceptionnel, en veillant à ce qu’il vise uniquement la création, et non la préservation, de nouveaux LUP, conformément à l’objectif initial de la LPPPL. Par exemple, ce droit ne devrait être exercé que lorsque les conditions d’acquisition du terrain permettent la viabilité d’un projet de LUP, et il devrait conduire à la création d’au moins quinze nouveaux LUP. La revente du terrain acquis au prix d’achat par la collectivité publique devrait être la seule option autorisée si la collectivité publique ne devait pas construire elle-même des LUP, excluant ainsi l’octroi d’un droit de superficie, afin d’éviter toute manipulation à des fins purement financières. Les partenariats public-privé sont à privilégier, car ils permettent une construction rapide de LUP sans risque financier pour la collectivité publique. De plus, la LPPPL propose des outils plus rapides, plus efficaces et plus respectueux du droit de propriété pour répondre aux besoins en logements de la population, tels que les bonus de construction ou la fixation de quotas.

Quelles sont vos autres prises de position et activités récentes ?

En plus de ce que nous avons décrit précédemment, nous avons activement œuvré en 2022 pour sortir la commune de Gland d’une paralysie imposée par un moratoire des constructions, en raison d’une saturation de sa station d’épuration, ne permettant plus d’accueillir de nouveaux logements sur la commune. A Montreux, la décision du Tribunal fédéral d’annuler le nouveau Plan général d’affectation commence à peser lourd sur le domaine de la construction locale. Un coup dur pour l’économie déjà mise à mal par le Covid et qui a suspendu une trentaine de projets en cours. Depuis, aucun autre projet de nouvelle construction ne s’est réalisé et le processus d’élaboration d’un nouveau plan d’affection n’a pas encore débuté. Ainsi, l’ADIV propose ses services pour trouver des solutions et dynamiser la commune. Enfin, l’association demeure un acteur engagé, œuvrant pour un développement immobilier vaudois cohérent, durable et respectueux de l’intérêt public.

ADIV – Association des développeurs immobiliers vaudois
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