Electricité Emosson SA

L’immense potentiel de l’hydroélectricité

 

La société de production hydroélectrique Electricité d’Emosson SA exploite le 2e plus grand barrage de Suisse en termes de capacité, avec 227 millions de m3 d’eau retenue. Binationale, l’installation capte les eaux du Massif du Mont-Blanc, dans les hautes vallées françaises de l’Arve et de l’Eau Noire mais aussi les eaux suisses du Val Ferret et de la Vallée du Trient. L’entreprise est intégrée dans le tissu local valaisan. Son directeur, Bruno Boulicaut s’implique, avec les élus, les entreprises et la population, pour développer les activités de la société dans la région.

Bruno Boulicaut, comment s’est négocié l’accord entre la Suisse et la France pour la construction de l’aménagement d’Emosson ?

L’ouvrage d’Emosson a la particularité de se trouver à cheval sur deux pays. Historiquement, la Suisse et la France ont fait des échanges de terrains pour faciliter la construction du barrage et des deux centrales électriques à Vallorcine et La Bâtiaz. L’acte signé en 1963 se compose de quelques pages seulement : impensable de nos jours ! Au début du XXe siècle, des droits ont également été concédés par les Chemins de fer fédéraux (CFF) en échange d’électricité pour leurs trains. Les CFF étaient alors titulaires de tous les débits du bassin-versant naturel et propriétaires du barrage de Barberine, désormais immergé sous 40 mètres d’eau du lac d’Emosson.

Un aménagement binational, est-ce-que cela implique une organisation ou une gestion particulière ?

Bien sûr, nous devons, par exemple, composer avec des lois différentes pour chaque pays. En Suisse, l’utilisation de l’eau est du ressort des cantons ou des communes, voire de la Confédération pour les aménagements transfrontaliers comme Emosson, tandis qu’en France, elle est du ressort de l’Etat. En l’occurrence, Electricité d’Emosson SA dispose de deux concessions suisse et française qui arriveront à échéance en 2055 et seront renouvelables sous de nouvelles conditions. Chaque année, les deux Etats, au travers d’une Commission de Surveillance, s’assurent de la bonne application des conditions-cadres de l’accord international.

Les 35 collaborateurs de la société (15 en France et 20 en Suisse) ne sont pas régis par le même droit du travail, viennent d’horizons différents et ne partagent pas la même culture. Ils doivent pourtant collaborer quotidiennement pour exploiter la centrale de Vallorcine en France et celle de la Bâtiaz en Suisse. Elles constituent en effet un ensemble et ne peuvent fonctionner l’une sans l’autre. Heureusement les équipes sont solidaires et l’organisation fonctionne en parfaite coordination.

Qui sont ces collaborateurs, quel est leur profil ?

Les personnes dédiées à l’exploitation et à la maintenance connaissent très bien la montagne, les risques d’avalanches, etc. A Vallorcine, cet hiver, du fait de l’important enneigement, des techniciens ont dormi durant plusieurs jours à la centrale pour garantir la sécurité des installations. Ils doivent aussi aimer la nature, car tout l’aménagement d’Emosson fonctionne au rythme de celle-ci. Ils sont très polyvalents, capables d’intervenir à la fois dans le domaine hydraulique, mécanique, électrique, et informatique. Ce sont des techniciens aux compétences multiples, autonomes et très engagés. Ce sont eux qui font vivre l’aménagement d’Emosson. La culture d’entreprise trouve ici tout son sens.

Quelles sont les atouts de l’énergie produite par Electricité d’Emosson et quelle est la mission de votre société ?

Le grand avantage de cette énergie réside dans sa flexibilité et sa rapidité à injecter d’importantes quantités d’électricité sur le réseau. C’est également une énergie renouvelable, indigène et exempte de CO2 qui peut répondre très rapidement à la demande en électricité.

La société a deux actionnaires et partenaires : Alpiq en Suisse et EDF en France. Electricité d’Emosson ne commercialise pas l’énergie qu’elle produit mais la met à disposition d’Alpiq qui, en contrepartie, supporte intégralement les coûts d’exploitation. Notre mission consiste donc à rationnaliser la maintenance et l’exploitation de l’ouvrage pour mettre à la disposition de notre partenaire une énergie à un coût efficient, tout en garantissant la sécurité et la qualité du kilowattheure produit. Par exemple, grâce aux avancées technologiques, notamment les outils numériques, nous avons pu augmenter la puissance totale de 380 mégawatts à 420 mégawatts. La modélisation numérique a permis de valider que l’installation pouvait supporter 40 mégawatts supplémentaires. Pour donner un ordre d’idée, en 2017, la société a mis à la disposition d’Alpiq une production de 885 millions de kWh, permettant de couvrir l’équivalent de la consommation annuelle de plus de 250 000 ménages.

Electricité d’Emosson a-t-elle encore des perspectives de développement ?

Oui, l’hydroélectricité est une énergie d’avenir, flexible et renouvelable. Elle représente 60% de la production électrique totale en Suisse et c’est le pilier de la stratégie énergétique 2050. Nous croyons en son potentiel, malgré les difficultés économiques qu’elle connaît actuellement.

Nous avons plusieurs projets en cours d’analyse. Grace au développement des outils numériques, nous cherchons à améliorer les performances des installations afin de nous adapter aux besoins de notre partenaire Alpiq et des marchés de l’électricité. Nous étudions par exemple la possibilité d’exploiter des chutes d’eau non équipées de l’aménagement.

Nous sommes également en pourparlers avec des partenaires locaux qui pourraient exploiter la chaleur générée par nos transformateurs pour couvrir, à terme, près de75% des besoins en chaleur des nouveaux quartiers de la ville de Martigny, actuellement en développement.

Quelles relations Electricité d’Emosson entretient-elle avec les acteurs régionaux ?

Aujourd’hui, nous restons proches des préoccupations collectives, notamment en ce qui concerne l’environnement. Electricité d’Emosson est engagée dans le programme de renaturation des cours d’eau. Nous avons mis en place des mesures pour lâcher plus ou moins d’eau en aval de nos prises d’eau et contribuer ainsi à la revitalisation de la faune et de la flore locales, quitte à perdre un peu de notre production. Electricité d’Emosson verse aussi une redevance aux communes pour l’utilisation de leurs eaux. Ces montants conséquents participent à l’économie locale. Nous sommes des industriels bien implantés dans la région et ne vivons pas dans notre cocon. Nous tenons à vivre en bonne intelligence avec tous les acteurs régionaux mais aussi nationaux et internationaux.

Electricité Emosson SA
Centrale de la Bâtiaz • Case postale 391
CH-1920 Martigny
Tél. +41 27 720 20 20 • Fax +41 27 720 22 77
www.emosson.ch